Palmer DREI – Triple amplificateur de guitare single-ended – Un test publié sur Sound on Sound

Pour l’enregistrement, voici peut-être l’ampli de guitare à lampes le plus polyvalent jamais développé…

La marque Palmer est surtout connue pour ses simulateurs de haut-parleurs et de baffles, utilisés par des légions de guitaristes. La gamme de produits Palmer s’est beaucoup élargie ces dernières années : elle propose désormais des pédales d’effets, des switchers en tout genre… Et en 2010, Palmer a dévoilé son premier ampli de guitare, le FAT50, à haut gain, suivi en 2011 par toute une famille de baffles. En présentant le Drei, un triple ampli à lampes de type single-ended, travaillant en Classe A, conçu par Markus Torvinen, Palmer passe sous les feux de la rampe : en effet, cet amplificateur est totalement unique en son genre.

Vu de l’extérieur
Le look du Drei ramène à une époque révolue, où les lampes régnaient, et où des ingénieurs en blouse blanche fabriquaient des amplificateurs conçus pour durer éternellement. La forme était dictée par la fonction, sans aucun apport des gourous du marketing ou du design. Le châssis du Drei, peint en gris, possède un panneau de contrôle légèrement incliné, et un capot métallique noir. Un look qui n’est pas sans évoquer un poste de radio à lampes des années 50 ! Un examen plus poussé révèle que la sérigraphie des contrôles, en blanc, est en langue allemande : de quoi renforcer encore ce côté “vieux poste de radio” Grundig, Blaupunkt, Braun ou Siemens du temps jadis.

La disposition des commandes en face avant annonce d’emblée la couleur : ce n’est pas un amplificateur comme les autres. Au jack d’entrée (Eingang) succèdent les réglages de gain (Sättigung) des deux canaux de préampli, Normal et Höhen (Bright), disposés en parallèle. Vient ensuite le potentiomètre Klang (Tone), suivi par les potentiomètres de réglage de volume des trois amplificateurs de puissance différents, eux aussi disposés en parallèle – Eins, Zwei et Drei.

Comme tous les bons amplificateurs à lampes, le Drei est plutôt lourd compte tenu de ses dimensions : il possède en effet de gros transformateurs secteur et de sortie, ainsi qu’un volumineux choke d’anode, qui domine le haut du châssis. À l’abri du capot de métal prennent place les différentes lampes : on dénombre trois 12AX7 pour le préampli ; trois lampes pour les amplis de puissance (une EL84, une 6V6 et une 6L6) ; et enfin, la lampe redresseuse, une GZ34. Les trois lampes de sortie du Drei sont utilisées dans des amplis de puissance single ended, travaillant en classe A, séparés et disposés en parallèle – EL84 (Eins), 6V6 (Zwei) et 6L6 (Drei). Rappelons qu’un amplificateur de puissance single ended se compose simplement d’une lampe et d’un transformateur de sortie. Toutefois, la présence d’un choke d’anode indique l’utilisation d’un étage de sortie de type parafeed, procurant une meilleure réponse dans les graves qu’une configuration single‑ended “pure”, et évitant toute saturation du transformateur de sortie – utile quand on se rend compte que le Drei intègre trois bobinages de sortie primaires dans un seul boîtier.

Voir une lampe redresseuse GZ34 utilisée ici est une bonne surprise : la plupart des amplificateurs à lampes modernes utilisent des étages redresseurs à transistors. De fait, si vous désirez un peu plus de puissance, vous pouvez en équiper le Drei. Je suis un grand fan des lampes redresseuses, car j’apprécie l’atténuation et la compression produites par les lampes de sortie lorsque l’alimentation est poussée à ses limites.

On trouve sur le site Web Palmer (www.palmer‑germany.com/192‑1‑drei. html) une vidéo dans laquelle le concepteur du Drei, Markus Torvinen, parle longuement de sa création. Personnellement, je suis un peu vieux jeu : je préfère les amplificateurs à lampes câblés en l’air. Mais quand un concepteur déclare qu’il a construit une version câblée en l’air du Drei et qu’il n’a pas entendu de différence avec une version utilisant un circuit imprimé, je veux bien me laisser convaincre. Autre fait qui a retenu mon attention : on ne compte que cinq composants passifs dans le chemin du signal de l’amplificateur – une preuve de la pureté de la vision de Torvinen.

À l’écoute
Avant de jouer sur le Drei, je l’ai branché sur un baffle THD 2 x 12 pouces et laissé tourner pendant 24 heures, afin de le roder. Les étages de sortie de puissance à lampes single‑ended, travaillant en Classe A, sont vénérés dans les cercles de la hi-fi et des audiophiles, qui leur attribuent des qualités relevant du mythe et de la magie. Utilisés dans des amplificateurs de guitare (et surtout lorsqu’ils intègrent des lampes redresseuses), ces circuits donnent des amplificateurs très sensibles au touché de l’instrumentiste et très réactifs. Ajoutez à cela un son alliant chaleur et cohérence, possédant une distorsion naturelle et sans artifice, et il n’est pas surprenant que ce type d’amplificateur jouisse d’une popularité qui dure depuis longtemps.

Le principal inconvénient des amplificateurs single‑ended réside dans leur faible puissance de sortie, qui les limite à des combos d’enregistrement ou de travail : citons par exemple le Vox AC4TV (qui utilise une lampe EL84), le Fender Champ (6V6) et le Cornell Romany (6L6). Si vous pouvez imaginer une configuration utilisant ces trois amplificateurs simultanément, alors vous avez une idée des types de sons que le Drei peut vous donner. Signalons au passage que, même si ce n’est pas mentionné dans le très stylé manuel utilisateur relié cuir (signé par Markus Torvinen lui-même), le catalogue Palmer révèle que vous pouvez remplacer la 6L6 du Drei par une EL34 – ce qui vous emmène dans le territoire des Marshall.

Jouer sur le Drei est un vrai plaisir. Passer d’une section d’entrée à une autre, un amplificateur de puissance après l’autre, donne les sons qu’on attend : une saveur carillonnante à base d’harmoniques sur le Eins, un son plus sombre, avec un overdrive plus doux, sur le Zwei, et côté Drei, une version plus ample et plus sombre du Zwei, avec des graves mieux contrôlés et des attaques plus marquées. Si on commence à mixer ces trois sections, et à agir sur les potentiomètres de gain des canaux de préampli Normal et Höhen (sans oublier, bien sûr, le niveau de sortie de la guitare), on se retrouve à passer des heures de bonheur à trouver précisement le son que l’on recherche. Il vaut mieux garder un carnet sous la main pour noter les réglages des meilleures de ces combinaisons : très honnêtement, j’ai dû vraiment chercher pour faire un son que je n’aimais pas.

Alternatives
J’ai trouvé deux alternatives au Drei disponibles sur le marché. Toutefois, aucun de ces amplificateurs ne propose exactement les possibilités du Drei. Le premier est le THD Bivalve. Il permet d’utiliser simultanément n’importe quel couple de lampes octales (8 pattes) et de choisir parmi une grande variété de lampes au niveau du préampli. Autrement dit, ce petit amplificateur autorise la composition de “cocktails de lampes”, selon votre désir, jusqu’à avoir trouvé “LE” son. Comme le Drei, le Bivalve réserve un enroulement de transformateur distinct à chaque lampe ; en revanche, on ne peut pas agir sur l’équilibre entre elles. Hélas, la disponibilité du Bivalve n’a jamais été aussi aléatoire : il faut vraiment se donner du mal pour en trouver un. Autre alternative au Drei : le Mesa Boogie Transatlantic TA15, qui dispose d’un mode utlisant une EL84 en Classe A, soit une puissance de sortie de 5 Watts. Le Transatlantic n’est pas exactement comparable au Drei, mais ses possibilités timbrales et son préampli deux canaux permettent d’accéder à une palette sonore étendue.

Conclusion
Cela faisait un certain temps que je n’avais pas pris autant de plaisir à jouer sur un tout nouveau modèle d’amplificateur. À part le fait que le potentiomètre Tone n’a plus guère d’action au-delà de la moitié de sa course, je n’ai rien trouvé à redire sur le Palmer Drei. Certains feront sans doute remarquer que le Drei ne possède pas de boucle pour effets ni de sortie DI, mais franchement, je trouve que ça n’a aucune importance. Je suis très content de renoncer à ces fonctionnalités en échange du plaisir de jouer sur cet amplificateur. Le Palmer Drei est un de ces modèles rares, faciles à utiliser, qui possèdent un super-son, et qui suscitent l’inspiration musicale lorsqu’on joue dessus. Les fêlés de sons tomberont tous amoureux de cette petite tête, et j’aimerais bien l’entendre avec des lampes vintage New Old Stock. Par ailleurs, je pense que le Drei possède un superbe rapport qualité/prix. Même en ajoutant le prix d’un baffle, je ne vois rien, à tarif égal, qui se rapproche du Drei en termes de possibilités sonores. Si vous désirez acheter un amplificateur d’enregistrement ou un petit ampli de concert, alors je vous recommande de placer le Palmer Drei en tête de votre liste d’amplis à écouter. Il est tout simplement superbe.

Pour

  • Conception unique, trois étages amplificateurs mixables
  • Look spécifique, délibérément rétro
  • “Tout lampes”, y compris l’étage redresseur
  • Très bon rapport qualité/prix
  • Son superbe

 

Contre

  • Absence de sortie directe et de boucle pour effet

 

Résumé
Le Palmer Drei est unique en son genre, puisqu’il combine deux préamplis différents, disposés en parallèle, et trois amplificateurs de puissance différents, eux aussi disposés en parallèle, de type single‑ended, utilisant respectivement des lampes EL84, 6V6 et 6L6. Cette tête suscite l’inspiration et met à disposition une palette de sons très étendue, du son clair aux distorsions les plus prononcées. Idéal pour les studios d’enregistrement et les petites scènes, le Drei a tout pour devenir un classique instantané.

Pour plus d’informations :

http://www.palmer-germany.com/mi/fr/DREI-Triple-Amplificateur-Single-Ended-PDREI.htm

Source : Sound on Sound Magazine, Grande-Bretagne, Décembre 2011

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